



Jamais Vu, Déjà Vu
Elaine Stocki
November 25, 2023 - January 13, 202024
Memories are clouds. They form and disperse, gather all at once, loom large, pass by. To know anything of the past is to commit oneself to some version of these strange patterns, fundamental to our interior lives yet random, unfixed by nature. Desire for understanding wanders between experience and recollection, the mind grafting partial images onto one another. What materializes is a loose facsimile of textures that keeps us close to reality while the imagination does its slow work of abstraction. This is the miraculous and banal effect of time; a simultaneous exposure and estrangement that, somehow, makes self-knowledge.
Seen is a declaration of the absolute: something has been encountered. But when the link between memory and perception is broken—even briefly—we lose the stability of what we know. Western psychology borrows jamais vu (never seen) and déjà vu (already seen) from the French to describe such a feeling as one of misplaced recognition. Though oppositional, both phenomena invoke a state of amnesia, where we might slip around the certainty of the past tense and into a realm of interlaced possibility. When the parameters of reality are cleaved apart, what can be said about seeing, of meaning as it emerges?
This question is one of several running through Elaine Stocki’s Jamais Vu, Déjà Vu. Across her practice, Stocki works in an intuitive register of material-as-metaphor, placing the tactile qualities of linen, watercolor, velvet, oil, and canvas into vivid experiments of color and composition. The braid surfaces as an apt motif; independent threads coalesce only to come apart, again and again, in rhythmic prediction and reaction. Evidence of the artist’s hand appears in stitches and seams. The mind flickers, the seasons turn.
Stocki’s aesthetic interests perhaps most strikingly converge in “December.” Based off of a photograph taken by the artist, the painting captures an elderly woman lying in bed, swathed in quilts. Her placid expression falls somewhere between the viewer and a lamp bulb. Memories could reside in the lines on her face and within the naked source of light, as if she is at once gazing forwards and back in time. This woman in the winter of her life is contrasted with “May,” in which exaggerated feminine physicality finds formal agreement with the archway shape of the canvas. There is certainly a photographer’s logic at play in both paintings. Seemingly disparate images coax significations from each other, a dual memento mori.
“Late Summer” distills an arrival and a departure. The surrounding velvet and canvas pieces function like an aperture, working in conjunction with the central scene to evoke the relentless motion of time. This cocooning effect is made eerie in “Night of the Hunter.” To my eye, the opacity of black velvet aims to obscure rather than frame. Stocki narrows the visual field into a scene of solitary enclosure, imbued with the narrative potential of a film still.
There is a sense of mystery shared by Stocki’s process and the final paintings. Themes and images often reveal themselves to her through creating the work, one painting giving rise to the next. Looking, then, is to participate in the making of meaning, that quiet act going on all the time. When might a memory reveal itself in full? Never, already, Stocki calls from the gloaming.
— Jayne Pugh
© Courtesy of Elaine Stocki, Night Gallery and cadet capela
© Credits photo: Thomas Marroni
Les souvenirs sont des nuages. Ils se forment et se dispersent, se regroupent, s’étendent et passent. Connaître le passé, c'est s'engager dans une version de ces schémas étranges, fondamentaux pour nos vies intérieures, pourtant aléatoires, non fixées par la nature. Le désir de comprendre erre entre l'expérience et le souvenir, l’esprit greffant des images partielles les unes avec les autres. Ce qui matérialise une imitation de textures, nous maintenant en contact avec la réalité pendant que l’imagination fait lentement son travail d’abstraction. C’est l’effet banal et miraculeux du temps ; simultanément une exposition et un éloignement qui, quelque part, créent la connaissance de soi.
Avoir vu est une déclaration de l’absolu : quelque chose a été rencontré. Mais lorsque le lien entre la mémoire et la perception est rompu - même brièvement - nous perdons la stabilité de ce que nous savons. La psychologie occidentale emprunte les termes « jamais vu » et « déjà vu » au français, pour décrire l’impression d’une situation illusoirement familière, pourtant irréelle. Bien qu’opposés, ces deux phénomènes évoquent un état d’amnésie, où nous pourrions contourner la certitude du temps passé et entrer dans un champ de possibilités entrelacées. Lorsque les paramètres de la réalité sont dissociés, que peut-on dire de la vision et de sa signification telle qu'elle émerge ?
Cette question est l’une des nombreuses qui traversent l'exposition Jamais Vu, Déjà Vu de Elaine Stocki. Dans l’ensemble de sa pratique, Stocki travaille dans un registre intuitif, du matériau en tant que métaphore, intégrant les qualités tactiles du lin, de l’aquarelle, du velour, de l’huile, et de la toile dans des expérimentations vives en couleurs et en compositions. La tresse apparaît comme un motif approprié; des fils indépendants se regroupent pour ensuite se séparer, encore et encore, dans une prédiction et réaction rythmique. La main de l’artiste apparaît dans les points et les coutures. L’esprit vacille, les saisons se succèdent.
Les intérêts esthétiques de Stocki convergent de manière frappante dans l'œuvre « December ». Basée sur une photographie prise par l’artiste, la peinture capture une femme âgée allongée sur son lit, enveloppée de couvertures. Son expression placide se situe quelque part entre une ampoule et le spectateur. Les souvenirs pourraient résider dans les rides de son visage et dans la source de lumière nue, comme si elle regardait à la fois vers le futur et dans le passé. Cette femme à l’hiver de sa vie, est contrastée par « May », où la féminité exagérée trouve un accord formel avec la forme arquée de la toile. Il y a certainement une logique de photographe à l'œuvre dans les deux peintures. Des images apparemment disparates suscitent des significations les unes des autres, comme un double memento mori.
“Late Summer” distille l’idée d’une arrivée et d’un départ. Les pièces de velours et de toile qui l'entourent fonctionnent comme une ouverture, travaillant de concert avec la scène centrale, pour évoquer le mouvement incessant du temps. Cet effet enveloppant devient plus étrange dans "Night of the Hunter". À mes yeux, l'opacité du velours noir vise à obscurcir plutôt qu'à encadrer. Stocki réduit le champ visuel à une scène d’enclos solitaire, imprégnée du potentiel narratif d'un arrêt sur image.
Le processus de Stocki et les peintures finales sont empreints d'un sentiment de mystère. Les thèmes et les images se révèlent souvent à elle au cours de la création de l'œuvre, une peinture donnant naissance à la suivante. Regarder, alors, c'est participer à la création de sens, cet acte silencieux qui se déroule en continu. Quand un souvenir pourrait-il se révéler entièrement ? Jamais, déjà, Stocki appelle depuis le crépuscule.
— Jayne Pugh